Présidente de l'Observatoire de la Parité

Avant-propos de l'ouvrage : Les Femmes et la Mutualité

J’ai débuté en Mutualité dans les années 1990. Militante depuis de nombreuses années au sein d’associations (issues notamment de la Ligue de l’Enseignement), je n’avais alors d’autre prétention que d’être administratrice d’une mutuelle locale. Puis, au fil du temps et des réunions, je me suis de plus en plus investie dans cette imposante institution qu’est la Mutualité. J’y ai découvert que l’univers mutualiste français est malheureusement lui aussi confronté au problème d’égalité des sexes et j’ai dû me rendre à l’évidence que, là comme ailleurs, la route serait longue pour y arriver ! L’Observatoire de la Parité m’a confirmé dans ce sentiment. Jusqu’à la publication de cet ouvrage de Michel Dreyfus, nous n’avions pas de connaissance historique de la condition des femmes en mutualité. À sa lecture, il m’a fallu constater que, tout au long du XIXe siècle, les sociétés de secours mutuels ont traité les femmes comme des « mineures » et que longtemps la maternité fut considérée comme une maladie. Certes, on découvre au fil des pages que des femmes engagées ont réussi à faire évoluer très progressivement les mentalités. Mais le chemin parcouru par ces militantes, dont Georges Grau a pointé en 1937 la présence au sein du mouvement mutualiste, n’est qu’un début. Force est de constater que beaucoup reste à faire… Le paysage mutualiste n’est malheureusement que le reflet d’une réalité générale. Une réalité qui, en France, reste encore tributaire d’une perception rétrograde qui réduit trop souvent la femme au statut de mère de famille, condamnée aux problèmes de garde des enfants en bas âge, aux absences répétées liées aux maladies de ceux-ci, etc.

Aujourd’hui, les femmes ne sont toujours pas considérées à leur juste valeur et subissent des inégalités importantes, et cela jusque dans les entreprises où la discrimination entre sexes devrait normalement être rendue légalement impossible. Même si le XXe siècle a connu une évolution de la place des femmes sur le marché du travail, quelques chiffres l’expriment de façon éloquente : en France, les femmes ne sont que 7 % parmi les cadres dirigeants et elles travaillent à temps partiel cinq fois plus souvent que les hommes. Pour couronner le tout, elles sont moins payées : pour un même travail et des compétences égales, les écarts salariaux avoisinent les 25 % !

Depuis la loi de juin 2000 tendant à favoriser l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux, les femmes ont fait leur apparition dans la composition du conseil d’administration et du comité exécutif de la Fédération Nationale de la Mutualité Française, à l’instar des institutions politiques, mais elles restent encore minoritaires dans nos instances. D’ailleurs, en 2005, tout comme en 1975, date à laquelle la première femme a été élue au bureau, une seule assumait ces fonctions.

L’opiniâtreté des femmes et leur mobilisation citoyenne permettront dans un avenir proche de les voir occuper plus souvent des postes de responsabilité au sein des conseils d’administration des instances mutualistes et, de façon générale, dans la vie politique et économique. Je n’ai pas l’ombre d’un doute que lors des élections futures du conseil d’administration de la Fédération nationale de la Mutualité française, nous verrons émerger un nombre important de femmes et que les hommes soucieux de solidarité et d’équité sauront apprécier cette heureuse évolution.

Nadine Giraud